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AVEZ-VOUS PRIS RENDEZ-VOUS AVEC VOS MORTS ?

pour un festin d’eau et de sucre. Dans le bol fumant, « cuire les patates douces jusqu’à leur faire fondre le cœur ». Une indication sensible pour un déjeuner rare. Prendre rendez-vous avec ses morts (les porteurs d’un texte étouffé). La vapeur de la cuisson dilate les corps. Il est temps de les lire. J’ai pris rendez-vous dans la montagne. Son air accélère le vieillissement. Le froid n’a aucune limite, on voit la pierre se mettre à croûter, le ciel à

gonfler. Je ne suis pas inquiète pour la montagne, le paysage bouge peu. À 7503m d’altitude, le corps se détériore. Le rendez-vous est donné à 7800. Zone de la mort.

LE CORPS EST UN TEXTE À TROU. Prendre soin d’un corps c’est lui retirer les organes, le vider de ses graisses, ne garder que les os. Triturer les corps est une occupation, car sous la peau, le texte. La flamme est le révélateur des mots creux. Avant de venir graver les os, les mots macèrent dans les urnes. Bien gorgés (oindre pour écrire) ils viendront creuser les os à venir. Les os sont tendres alors brûlons (brûler pour lire) -les. Blessés, ils requièrent un traitement attentionné. La brûlure est leur dernier soin. À force, les plaies se racontent à voix haute. Pour lire son mort, soyons groupés.

CE QUI ECHAPPE À LA LECTURE. Une rangée de corps, assis sur une branche pourrissante, tourne le dos. Le beurre étalé sur leurs chevelures, assoupli cette image première. Une chaise vide m’attend. À 7800m, les os gorgés de pluie patientent. La flamme brûle mais rien ne cuit. La pierre se gonfle pour lutter mais l’infime flamme dégénère les momies fument la montagne est dévorée les os ont chaud ils bougent enfin se rassemblent . Dans cette cicatrice de pierre une horde de cochons se réfugie. Sucés jusqu’à la moelle par ces cochons effrayés, nos textes se

mêlent enfin.

 

Vu ce matin, une aile de paradisier appuyée sur un brin d’herbe pour saisir un infime

morceau d’os brûlé. Y est écrit ___________. Mot manquant à la construction du nid

d’amour.

 

                                   Déborah Gutmann rencontre une image de Léo Nataf

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J'AIMERAIS QUE LA COLLINE RACONTE 

CERAMIQUE, SYLEX, OS, ACIER, BOIS, PVC

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